Lucky Luciano
Chronique d’un gangster influent

 


Posté le  29.09.2015 à 16h20


 

CULTE - Projeté au festival Lumière dans une sublime copie restaurée - à l'occasion de la carte blanche accordée à Martin Scorsese -, Lucky Luciano reste, plus de quarante ans après sa sortie, un film culte qui fit à l'époque de Francesco Rosi l’un les plus célèbres pourvoyeurs d’un cinéma transalpin social et engagé.

 

 

L’Histoire ne dit pas combien de noms d’emprunt Charles Luciano, surnommé  « Lucky Luciano » pour avoir survécu à un violent passage à tabac, a compté avant de trouver la mort, à Naples, le 26 janvier 1962. Né en 1897 en Sicile sous le nom de Salvatore Lucania, Charles Luciano a été l’un des plus grands criminels de son temps.

Lorsqu'en 1906, ce jeune sicilien émigre avec ses parents à New York pour goûter au rêve américain, il est très vite davantage attiré par la rue que par les bancs de l'école. Se livrant d'abord aux petits trafics, sa notoriété - tout comme son ambition et son influence - croit très rapidement au sein de Big Apple et de ses ramifications mafieuses. Quelques années plus tard, l'aura de l'homme a atteint un tel degré d'autorité qu'elle croise un jour le chemin de celle d'un certain Al Capone, figure mythique de la mafia italo-américaine de Chicago. À 46 ans,  « Lucky Luciano » est alors à son apogée dans le milieu des malfrats gangrénant l'immense cité américaine.

Mis en musique par Piero Piccioni, Lucky Luciano évoque les années qui ont précédé la mort du malfrat italo-américain, depuis sa sortie de prison, consécutive à sa condamnation, jusqu'à son exil forcé vers son pays d’origine et sa mort, à Naples, en 1962. Installé par la suite en Italie, Luciano continua à gérer un trafic d’héroïne tentaculaire.

 

 

Déployé de façon anachronique, ce long métrage aux sommets lyriques dénonce les relations étroites entre la pègre et les élites politiques au sortir de la Seconde Guerre mondiale. Le problème du pouvoir, tout comme les causes et effets des rapports entre le pouvoir légal et illégal, ont toujours été des thématiques chères à Francesco Rosi. Déjà, dans ses premiers films - Le Défi, 1958 et , I Magliari, 1959 -, le réalisateur avait évoqué les rapports entre les petits et grands mafieux napolitains, en Italie ou à l'étranger.

Pour interpréter le rôle de ce gangster avide de pouvoir, Francesco Rosi fit appel à Gian Maria Volonte, acteur italien rendu célèbre hors d'Italie pour ses rôles de « méchant » dans Pour une poignée de dollars (1964) et Et pour quelques dollars de plus (1965), deux immenses succès de Sergio Leone. « Gian Maria réussissait à faire émerger toutes les ambiguïtés dont j’avais besoin pour définir la personnalité obscure de Lucky Luciano. Gian Maria était devenu Lucky Luciano », dira le cinéaste à propos de son acteur phare.

Au moment où débute tournage du film, la mode des fictions sur la mafia est à son paroxysme. Le succès de cette tendance forte du cinéma mondial, et notamment celui du Parrain, de Francis Ford Coppola, ne détourna jamais Rosi de son projet.

B.P.

La restauration du film, présenté en copie numérique 4k, a été entreprise par Martin Scorsese et la Film Foundation. Elle a été réalisée par la cinémathèque de Bologne au laboratoire L’immagine Ritrovata, en collaboration avec Cristaldi Film et Paramount Pictures.

---

Lucky Luciano, de Francesco Rosi (1973, 1h55)

> Jeudi 15 octobre à 21h à l'Institut Lumière

Catégories : Lecture Zen