Posté le 16.10.2015 à 10h29
La Vallée de la peur, de Raoul Walsh (1947) - Une fille jeune et déterminée cherche quelqu’un dans les ruines d’une maison en plein paysage de l’ouest américain. La Vallée de la peur de Raoul Walsh est un des débuts de films les plus romanesques du monde, surtout quand on voit que la fille a le visage intelligent et concerné de Teresa Wright, et que le garçon recherché a le torse puissant de Robert Mitchum. « Pourquoi tout a-t-il mal tourné ? », c’est ce que se demandent à la fois les personnages et instantanément les spectateurs touchés, appâtés par ce couple mystérieux qui visiblement a besoin l’un de l’autre.
Le besoin d’un autre est la phrase leitmotiv de nombreux grands cinéastes traqueurs d’histoire réelle, à commencer les frères Dardenne, qui sont aussi de très grands amateurs de western. La Vallée de la peur enchaine ainsi les plans poignants où il n’est question que du ou des liens qui nous unissent les uns aux autres. C’est le visage d’un enfant qui soudain se retourne avant de plonger dans le noir, ou le même enfant, devenu adolescent, qui se met en retrait parce qu’il est orphelin et rejette le monde d’un seul coup, en portant ses mains à son front. Toujours entre moments d’abandon et d’espoir en l’autre, et sensation de peur, La Vallée de la peur, bien nommée (en français, Pursued en anglais), est une histoire qui joue sur la menace. A quel point l’autre est-il fiable ? A quel point le héros lui-même est-il celui en qui on peut avoir confiance ? Walsh joue en permanence avec les yeux mi-clos de crocodile indolent de Mitchum jeune, pour semer doute et ambiguïté et tenir le spectateur dans l’envie de savoir particulièrement de quoi il s’agit, au bout du compte. Arrive alors une scène sublime où Mitchum, tel Cary Grant avec son verre de lait dans Soupçons d’Alfred Hitchcock, débarque dans la chambre de l’héroïne, grand, droit, sombre, accomplissant des gestes qui semblent paradoxalement immobiles pour jouer tout l’enjeu du film. C’est le grand moment de la peur et de l’emportement, le moment de tenir le coup ! A ce jeu, rarement Mitchum n’aura été aussi puissant, aussi protecteur et dangereux à la fois. Ce film vous fera tous chavirer.
Virginie Apiou
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