La Bandera

Depuis ses débuts en 1919, Julien Duvivier a tourné trente-cinq films, pris avec brio le virage du parlant et multiplié les succès. En 1935, c’est Jean Gabin, qu’il a fait jouer dans Maria Chapdelaine l’année précédente, qui le convainc de s’inspirer du roman de Pierre Mac Orlan (l’acteur, admirateur de l’écrivain, a posé une option sur les droits chez Gallimard). Duvivier décide alors de faire équipe avec le scénariste belge Charles Spaak, futur très grand nom du cinéma français.

La Bandera est un film pessimiste, un film sur le destin, avec en outre une dimension documentaire (Mac Orlan viendra sur le tournage au Maroc espagnol retrouver ses amis rencontrés durant l’écriture de Légionnaires). Au sein de la Légion, on ne retrouve que des naufragés de la vie, et aussi un mouchard – brillamment interprété par Robert Le Vigan – avide de la récompense promise, qui tourmentera de manière incessante Jean Gabin. Des soldats, des parias, des bouges, la fatalité, l’absurdité de l’existence… La Bandera relève bien de ce qu’on appellera plus tard le réalisme poétique.

La Légion étrangère est alors à la mode, elle est un vecteur de rêve – képi et sable chaud… Sa mythologie permet d’aborder les thèmes de la fraternité au combat et de l’héroïsme salvateur. Jean Gabin est un Pierre Gilieth parfait, entouré d’une superbe galerie de ces seconds couteaux qui feront les beaux jours du cinéma français des années 1930.

La Bandera sera un succès phénoménal. Gabin construit peu à peu sa légende de mythe vivant et Duvivier entame sa période phare.